Actuellement, la France occupe la dernière place dans la course au vaccin contre le Covid-19. Au cours du mois de décembre, le groupe pharmaceutique Sanofi a annoncé un retard dans ses recherches de vaccin contre le coronavirus. Ce lundi 25 janvier, l’Institut Pasteur a à son tour déclaré avoir jeté l’éponge sur son projet. L’hexagone semble avoir perdu le goût du risque en matière de recherche scientifique. L’industrie pharmaceutique française est jugée trop conservatrice et trop déconnectée des start-ups innovantes. Poursuivez la lecture de cet article pour en savoir plus sur les vraies raisons.
SANOFI et PFIZER, même combat ?
Le retard de l’entreprise Sanofi dans la recherche de vaccin contre le Covid-19 ne peut pas seulement être considéré comme étant la cause d’une attitude craintive ou d’un manque de connexion entre les start-ups. La raison est beaucoup plus complexe. Les écosystèmes de Sanofi, de Pfizer-BioNTech et de l’Institut Pasteur ne sont pas si différents que cela. Chacun d’entre eux possède une structure universitaire pour la recherche fondamentale, un investissement d’origine privée ou publique et une start-up pour la recherche appliquée. Ils ont également tous signé un partenariat avec un géant pharmaceutique. Les partenariats permettent de bénéficier d’une aide considérable au niveau de la logistique et de la production. Quelques fois, les associations dépassent les frontières. Par exemple, Sanofi a conclu un partenariat avec l’entreprise américaine spécialisée dans l’ARN messager « biotech » tandis que l’Institut Pasteur a choisi de s’allier au groupe britannique GSK, au ministère de la santé, au géant américain Merck et à l’université de Pittsburg. Les sociétés en veille technologique désignent souvent des start-ups innovantes afin de s’associer avec elles. Des études du Conseil d’Analyse Economique (CAE) ont montré que certaines entreprises acquièrent de jeunes entreprises innovatrices dans le but de tuer dans l’œuf une invention qui menacerait leur position. Cette pratique est appelée « acquisition tueuse ».
5% de réussite
Les entreprises Pfizer et Moderna ont décidé de partir de quelque chose qu’elles connaissent bien. La stratégie de Sanofi avec son vaccin contre la grippe est une idée assez pertinente. Cependant, l’enseignante-chercheuse à l’Université Sorbonne Paris Nord, Nathalie Coutinet a souligné qu’il y avait une part de risque et de hasard dans la recherche. Le sociologue spécialiste des questions de santé publique et directeur de recherche au CNRS, Henri Bergeron pense également que c’est toujours un pari risqué pour les industries pharmaceutiques, de se lancer dans des nouvelles thérapies innovantes. Un projet au stade clinique développé au sein d’une industrie pharmaceutique a moins de 5% de chance d’atteindre le marché. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), il y a actuellement, 237 vaccins contre le Covid-19 en cours de développement dans le monde. 64 d’entre eux sont en train d’être testés sur des humains. Les 173 restants sont en phase pré-clinique. Parmi les 237, seulement 20 ont pu atteindre la troisième phase de tests. Actuellement, seuls deux ont été approuvés par la commission européenne. Il s’agit des vaccins de Moderna et de Pfizer-BioNTech. Dans le cadre d’une recherche vaccinale, les règles sont plus strictes car les remèdes sont testés sur des personnes en bonne santé. Les effets indésirables admis sont beaucoup moins nombreux.
La recherche fondamentale sous financée
Selon le Conseil d’Analyse Economique, le manque de moyen de la recherche fondamentale française est l’une des principales causes de ce retard. Les économistes Anne Perrot et Margaret Kylea déclare dans la note du CAE, « L’enveloppe publique française dédiée à la recherche en biologie-santé se réduit tandis que le budget total alloué à la recherche stagne (voire ralentit légèrement) à des niveaux faibles en comparaison de nos voisins européens ». La France ne consacre que 2% de son PIB à la recherche. Seulement 18% de ce budget est consacré à la santé et à la biologie. Entre 2011 et 2018, les crédits publics en recherche et développement pour la santé ont diminué de 28%. En Allemagne et au Royaume-Uni, la situation est tout autre. Dans ces régions, les crédits publics ont augmenté respectivement de 11 et de 16 pourcents. Le retard de la recherche française est en grande imputable à l’Etat. Ce dernier ne met pas en place les moyens nécessaires pour permettre à la recherche d’irriguer des start-ups innovantes. Les revenus des chercheurs et leurs conditions de travail sont meilleurs à l’étranger. En 2013, le salaire moyen des chercheurs débutants en France représentait 63 pourcents de celui des chercheurs dans les pays de l’OCDE. Certains analystes ont constaté que dans de nombreux cas, l’argent public n’est pas convenablement dépensé. Parfois, la majeure partie des fonds financent des recherches qui ne répondent pas aux standards internationaux par rapport à leur rigueur scientifique. Dans l’hexagone, le financement des start-ups n’est efficace que pour amorcer un projet. Il n’y a pas de suivi dans le temps.